"Les choses"...

 
Ces événements qui nous percutent, ces patients qui nous touchent, ce soin qui souvent nous use, parfois nous épuise.
Ce conjoint qui ne me comprend pas, cette blouse dans laquelle décidément je commence à me sentir étriquée.
 
Accepter de les vivre, ce n'est pas les accepter tout court.
 
C'est différent du '"c'est comme ça" qui nous a plombées quand on était petites. Cette affirmation implacable qui condamne à la passivité et à l'absence de mouvement.
C'est peut-être davantage accepter avec lucidité que ce que nous vivons n'est pas anodin, sans en faire tout un plat ! C'est peut-être paradoxalement la première étape indispensable pour retrouver la capacité d'agir de façon ajustée. Et je veux pas la ramener hein, mais agir, n'est pas forcément faire

Comment passer de l'instant où nous réalisons que la vie ne peut se vivre sans garantie à celui où nous serons capables de continuer à nous lever le matin sans certitude, ni perfection, ni sécurité absolue ? *

 
Cynthia Fleury nous met peut-être sur la voie, nous soignantes : dans Le soin est un humanisme elle évoque notre  capacité agissante et dit que c'est bien la mise en mouvement et non pas la réussite qui nous permet de redevenir "capacitaire". Je bois ses paroles, et du ptit lait avec : adieu l'illusion de l'efficacité et de l'infaillibilité, bonjour et bienvenue réalisme et tendresse !
 
Ne pas les combattre, ne signifie pas non plus qu'il n'y ait pas de combat.
Mais davantage accepter qu'il y ait un combat dont on ne connaisse pas l'issue.
Accepter le risque, les limites, l'inattendu, le "pas joué d'avance".
Plutôt qu'un combat y voir un défi, une chance, une opportunité.
 

C'est croire que le combat se situe peut être davantage en nous-même.

Dans cette tentation de toute puissance et d'efficacité.
Dans celle de vivre comme si le souci de l'autre signifiait l'oubli de nous-même.
 
Nous seules connaissons nos combats, nos luttes, nos défis !
Sachons résister sans nous arc-bouter, car la crispation cristallise.
Sachons ne pas faire rimer résilience avec résignation.
Sachons nous adapter, sachons nous questionner.
 
Et si nous faisions rupture ? Et si nous décidions de faire sésession sans faire cessation, sans faire sensation ?
Reprenons le pouvoir en prenant le temps, en ralentissant. Dans cette vie survoltée, surchargée d'inquiétudes et de questions sans réponses.
 
Et si nous ne savons pas, si nous sommes démunies, sachons voir cette vulnérabilité comme une occasion de nous mettre en lien avec d'autres, qui en sont au même point, ou qui ont déjà fait un peu plus de chemin.
 
*Nous interpelle Marion Muller-Collard dans l'Autre Dieu...