Quelques petites questions me turlupinent :
As-tu déjà eu le sentiment de ne pouvoir avancer dans ta vie comme tu le souhaitais ?
As-tu déjà eu l’impression de ne plus habiter ce corps et cette existence, finissant par traîner l'un comme l'autre comme des boulets ?
La fatigue, la pression, t'ont-elles déjà fait traverser la colère, le doute, la peur, pour aboutir à une sorte de déconnexion ? Incapable désormais de ressentir et vivre la joie à laquelle tu te sentais pourtant appelée ?
Si ces questions te parlent c'est sans doute qu'il y a un petit quelque chose chez toi qui se sent interpellé.
Pour tout te dire ça arrive à bon nombre d'entre nous. Et quand ça nous percute un peu trop voilà ce qui se passe fréquemment :
Au début, on fait ce que l'on connaît bien : on va « consulter » et on entame une thérapie « classique ». Généralement on a souvent beaucoup de clarté sur la situation, on peut en expliquer les mécanismes, l’analyser, la décrire. En tant que soignantes on est assez rompues à l'exercice.
Mais n'en faisons pas une généralité, car parfois on est tellement dans une impasse qu'on n'a plus les moyens de se mettre en position "méta".
On en arrive néanmoins assez systématiquement à la conclusion qu’il y a quelque chose qui cloche, ou plutôt quelqu’un : et c'est, je te le donne en mille : nous-mêmes !
Ou bien on est tellement pétries de psychologie positive que le raccourci se fait assez vite :
"Si je me sens mal, je suis à 100% responsable de le vivre mal. Je n'ai qu'à mettre mes lunettes du positif, et hop, ce qui me paraissait insupportable va devenir instantanément de la guimauve !"
Pourtant la plupart d'entre nous ne parviennent pas à faire différemment. Pourtant elles prennent de « bonnes » résolutions, se forcent à voir en « positif ». Elles vivent alors des moments de « mieux » et puis tout recommence comme avant …
Elles ont alors le sentiment de tout essayer, de chercher des réponses et des avis à l’extérieur et ça ne leur rend pas la vie belle pour autant !
Elles se retrouvent épuisées, sur le carreau, complètement déboussolées…et désespérées !
S’en suit un grand sentiment de tristesse, et surtout elles racontent qu'elles ont énormément culpabilisé de ne pas parvenir à vivre l’idée qu'elles s'étaient faite de celle qu'elles devaient être…
Ça paraît un peu tordu comme ça mais elles ont ainsi culpabilisé d’autant plus qu'elles étaient censées détenir les clés.
On fait toutes pareil : on essaie, comme on peut, avec les moyens qu'on a à tel ou tel moment.
Je vais te dire comment ça s'est passé pour moi : il a fallu que je renverse ma vision des choses.
Plutôt que de vouloir changer, conformer, rectifier tout ce qui en moi faisait de la résistance et provoquait de la souffrance, j'ai pris la tangente inverse :
J'ai autorisé ces "insatisfactions", ces frustrations et ces désarrois à exister et à s'exprimer.
J'ai osé être celle qui, loin de se satisfaire de ses imperfections, les a accueillies avec davantage de tendresse.
Prendre du recul et ralentir. Me connecter davantage à moi, incomplète, poreuse, faillible.
Ce qui m’a entre autre permis de cesser de renvoyer mes insatisfactions sur l’extérieur (ni sur mes enfants, ni sur mon mari, les contraintes, les coefficients de marée !…)
Cela a été un temps où j'ai repris la responsabilité de ma vie.
Un temps pour oser agir, penser, différemment, et finalement me laisser transformer. M'accorder du temps, me rechoisir, requestionner tous les conditionnements qui m’avaient façonnée ou dans lesquels je m'étais glissée sans m'en rendre compte.
Moment fort où j'ai construit une juste estime de moi. Je me suis en quelque sorte auto-validé, ce qui m'a permis de ne plus attendre que les autres tiennent le tampon de validation à ma place.
C’est grâce à cette reconnexion, à ce retour à mes aspirations profondes, à l’écoute de mes besoins, … que j’ai retrouvé les moyens et l’énergie de me mettre véritablement en action : prendre les décisions déterminantes au service de mes projets professionnels et personnels, prendre pleinement ma place et concilier enfin plus sereinement toutes les facettes de la Femme que je suis : femme, épouse, mère, professionnelle, amie, fille, sœur, …
On peut appeler ça la réalisation de soi.
C’est un chemin sans fin qui demande à être accompagné parce que cela réclame du courage.
C’est d’ailleurs pour cette raison il me semble, que les femmes qui ont fait ce travail et cette recherche intérieure nous semblent si épanouies, si puissantes.
Elle se sont laissé déplacer puis transformer par cette recherche. Elles incarnent alors avec justesse et authenticité celles qu’elles sont profondément.
Sans fard, sans costume. En considérant leur vulnérabilité comme une force.
« Oser être soi » prend un autre sens, celui de la liberté quand on comprend qu'on n'est pas une version brouillon d'un être parfait. Un être parfait que l'on deviendrait en réussissant ce foutu parcours d'obstacles de notre vie, en faisant les "bons" choix, en ne se trompant pas.
Rappelons-nous que nous sommes "une Terre promise jamais effective" *, et c'est heureux.
*Paul Ricoeur